lundi 28 juin 2010

Une ville de fous.


Il y a une ville aux USA un peu plus pourrie que la moyenne (si tant est qu’on puisse vraiment quantifier la pourriture qui sévit dans une ville). Et dans cette ville pourrie il y a un commissariat de Police, avec un projecteur géant sur son toit. On ne l’allume que lorsque la situation l’exige, quand les forces de Police sont dépassées par un criminel hors-norme. Et l’image projetée, déchirant le voile noir de la nuit, recèle en son sein autant d’espoir que d’effroi .L’image d’une chauve-souris. Bienvenue dans la ville de Gotham.
Bienvenue dans la ville de Batman !
Jim Gordon,légendaire commissaire de la ville est à la retraite.
Mais l’unité anti-crime qu’il avait lui-même composée est encore en place : la M.C.U (major crime unit) ! Et parmi les inspecteurs, certains ne voient pas d’un très bon œil qu’un malade déguisé en chauve-souris face leur boulot. Pourtant,lorsque que l’un d’entre eux est tué par Mr Freeze,la question de savoir si il faut ou non faire appel au chevalier noir va inévitablement se poser.
Et les relations entre la police et le protecteur de Gotham ne vont cesser de se dégrader au fil des épisodes : l’ère de Jim Gordon est bel et bien en train de se finir.






Gotham Central est tout sauf un comic de super-héros. Certes on en croisera quelques uns (Batman en tête of course) mais ils se cantonnent à de très petits seconds rôles. Les scénaristes, Ed Brubaker et Greg Rucka se penchent tout autant sur une étude des caractères des divers personnages que sur des intrigues policières . Evidemment , à Gotham, les enquêtes de la brigade tournent surtout autour de la faune Gothamite mais au final les ficelles pour choper un super-vilain sont les mêmes que pour attraper un criminel ordinaire : interrogatoire, recueil d’indices, planque, filature etc… avec en filigrane la question qui fâche : la présence de Batman est-elle un facteur de l’apparition de super-vilains ou seraient-ils quand même apparu sans lui ? Les inspecteurs de la brigade ont chacun leur avis mais tentent de ne pas se prendre le chou entre eux quelques soient leurs opinions sur le sujet : ils sont une équipe et doivent rester soudés !


Brubaker et Rucka n’écrivent pas tous les arcs narratifs ensemble ,ce qui a le mérite de ne pas faire se focaliser la série sur un partenariat d’enquêteur,tant l’attachement à un perso en particulier peut vite survenir. Les deux auteurs sont très à l’aise dans le domaine du polar et de l’évolution des personnages, cependant chacun a une force différente : Brubaker travaille plus son intrigue et Rucka travaille plus ses personnages. On pourrait presque dire que Ed Brubaker a un ratio de 60/40 et Rucka de 40/60. Ainsi en passant de l’un à l’autre le lecteur n’est pas dépaysé mais peut sensiblement sentir la différence d’intérêt. Les limites sont plus floues lorsque les deux hommes bossent sur un même arc mais cela arrive finalement peu dans l’ensemble de la série.




Au dessin on retrouve Michael Lark,adepte d’un style réaliste et assez droit. Il donne une prestance à chacun des personnages de l’histoire et se situe clairement dans la ligne directe de David Mazzuchelli,qui marqua l’histoire de la chauve-souris en dessinant l’emblématique « Year One » (ces deux dessinateurs ont d’ailleurs tous deux travaillé sur Daredevil avec l’auteur de la série Gothamite avec qui ils ont bossé). Vers la fin de la série cependant il sera remplacé par Kano et Stefano Guadiano, qui resteront dans la mouvance graphique, procurant une homogénéité complète à l’œuvre, car Lark est parti avec Brubaker s’occuper de Daredevil chez Marvel.
Bien que la série soit assez accessible,il faut néanmoins posséder une légère culture sur Gotham pour bien l’appréhender. Mais rien de trop compliqué non plus,si vous avez regardé plusieurs épisodes de la série animée des années 90 consacrée à Batman,vous ne devriez pas être perdu,certains personnages comme Harvey Bullock ou Renée Montoya s’y invitant de manière plus ou moins régulière.

La série a été éditée chez deux éditeurs de par chez nous : pour la lire en entier dans l’ordre il convient de commencer par les deux tomes parus chez Semic,la traduction de Alex Nikolavitch est de bonne facture et se lit avec plaisir. Quand la licence passe chez Panini il faut lire les tomes 1 et 2 (la numérotation est reprise du début,dommage) et ensuite embrayer sur un tome « Big Book » . Si les deux premiers tomes de Panini sont sur papier glacé,comme ceux de Semic,il en va tout autrement pour le big book qui est imprimé sur ce qui ressemble à du papier journal,il va jaunir avec le temps et faire perdre de la couleur, ce qui est regrettable. L’autre point regrettable vient de la traduction de Khaled Talid. Certains termes changent, comme si il n’avait pas pris la peine de lire la tradcution des tomes dont il ne s’est pas occupé, la M.C.U devient la B.C (brigade criminelle),Gothamite deviens Gothamiens,les jurons sont remplacés par des p%£*$ de signes pour ensuite devenir de simples « * »,ce qui facilitent la traduction,pas la peine de s’emmerder à taper sur différentes touches après tout.
Une sérié à découvrir donc tant sa qualité est certaine. Qualié qui sera reconnue à travers différents prix reçus mais qui ne trouva jamais son public et qui se stoppa après 40 épisodes de tensions et de drames.


PS : un petit cours d'histoire pour expliquer le titre de mon article. Gotham,avant d'être une ville fictive des USA,était le surnom de New York. Pour comprendre ce surnom,il faut remonter à l'époque du Roi Jean (oui le frère de Richard Coeur de Lion). Celui-ci voulait traverser la région de Gotham,petit village anglais,mais la route devait être payée par les habitants qui n'avait rien demandé. ceux-ci décidèrent de se faire passer pour fous lorsque l'on viendrait demander les taxes supplémentaires nécessaires à la construction. Certains s'installèrent à l'envers sur leurs chevaux,etc...L'histoire ne dit pas si le stratagème a marché...mais le nom du village est resté associé à la folie. Les toutes premières histoires de Batman (en 1938 déja !) avaient pour cadre New-York,dont l'un des surnoms servira à nommer la ville une fois qu'il sera décidé de faire évoluer les héros dans des cités fictives.

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